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LA MODE DU QUINOA

Depuis deux décennies le quinoa fait la joie des adeptes du bio, des “vegan”, des bobos parisiens et la relative richesse des paysans d’Amérique latine. Il est à la mode, les ventes augmentent de façon régulière et on lui prête de nombreuses vertus dont celle de remplacer la viande dans les repas. Il est temps de relativiser et d’analyser le phénomène..

Le quinoa est une espèce de pseudo-céréale, il étroitement lié à des espèces telles que la betterave, l’épinard et l’amarante.

Cette plante traditionnelle est cultivée depuis plus de 5 000 ans sur les hauts plateaux d’Amérique du Sud et a beaucoup de qualités nutritionnelles. Comme le haricot sec, la pomme de terre, le maïs, le quinoa était à la base de l’alimentation des civilisations précolombiennes, mais, contrairement à ces dernières, il n’a pas retenu l’attention des conquérants espagnols à cause de la teneur en saponine de l’enveloppe de ses graines non écorcées (goût amer), et du fait que la farine qui en est tirée n’est pas panifiable en raison de l’absence de gluten.

Dans les années 1970, les pays industrialisés, toujours en quête d’une alimentation plus « saine », découvrent les qualités nutritionnelles du quinoa qui est désormais distribué dans la plupart des grandes surfaces, notamment dans les magasins de produits issus de l’agriculture biologique et du commerce équitable.

Le quinoa est très digeste, pauvre en lipides, mais assez riche en fer et en protéines. La qualité de ses acides aminés (et donc de ses protéines) et de ses lipides en fait une céréale très intéressante sur le plan diététique. En moyenne, le quinoa contient 16 à 18 % de protéines à l’état cru (mais attention, on le mange cuit et le poids n’est pas le même). Il contient également les huit acides aminés essentiels à la vie humaine alors que les céréales ont un acide aminé limitant (la lysine fait défaut). Sa graine rappelle le millet. Il a une texture de caviar et un goût léger de noisette. Il se cuisine facilement salé comme sucré.

Les lipides sont compris entre 2 et 9,5%, notamment sous forme d’acide oléique (20 à 30%), linoléique (49 à 56%) et alphalinoléique (9 à 12%). La présence de vitamine E, antioxydant naturel, protège ces lipides insaturés et améliore la conservation. Le quinoa contient de l’amidon (52 à 69%) et des fibres (7 à 10%). De ce fait, l’index glycémique du quinoa est bas. Sur le plan vitaminique, les teneurs en vitamine E, B6, B9, B2 sont élevées. Le quinoa est riche en minéraux (Magnésium, zinc, Calcium). Il apporte aussi des flavonoïdes qui sont de bons antioxydants.

Petit bémol toutefois : sur le plan des facteurs de malabsorption, le quinoa contient de l’acide phytique et oxalique, de la saponine, des tanins, ce qui fait qu’il est déconseillé aux enfants de moins de 2 ans. Ces facteurs limitent la biodisponibilité des principaux nutriments et des oligoéléments. Le polissage industriel, le mode de préparation à la maison, la germination, permettent de limiter cet effet : pour le consommer, il faut le rincer dans l’eau pour éliminer son goût amer et le faire tremper. On le fait de préférence cuire dans trois fois son volume d’eau bouillante. On laisse mijoter à feu doux jusqu’à l’apparition du germe (environ 20 minutes). Ensuite, on couvre pendant quelques minutes et on laisse le quinoa absorber l’eau restante. Il peut remplacer en accompagnement le riz, la semoule ou les pâtes.

Le quinoa cuit apporte autour de 120 Kcal aux 100 grammes. Une portion de 40 grammes crus apporte environ 140 Kcal et correspond à une tasse de 120 grammes une fois cuit. Son apport calorique provient essentiellement de sa teneur en glucides complexes. Si vous faite attention à votre ligne, une portion de quinoa quotidienne vous fera le plus grand bien pour très peu de calories.

La farine de quinoa permet de faire de nombreuses préparations habituellement réalisées avec du blé, comme les crêpes, fars… à condition de réduire la quantité de moitié, car la farine de quinoa a un pouvoir d’absorption beaucoup plus important.

Réputé pour sa capacité de résistance face à des conditions climatiques extrêmes (sécheresse, gel), le quinoa se développe dans un milieu aride (besoin de 600 mm de pluie par an) où les sols, pauvres, sont exposés à la sécheresse, au gel, au vent violent et à la forte radiation solaire due à l’altitude. Victimes du succès commercial de la graine de quinoa, les agriculteurs se sont mis à cultiver à présent des zones de plaine. En climat océanique il est conseillé de semer le quinoa dès avril (pour l’hémisphère nord), car, si la température est trop élevée, le quinoa germe mal.

Le Pérou et la Bolivie sont les deux premiers producteurs mondiaux de quinoa. Les chiffres fait état de plus de 24000 à 30 000 tonnes dès le début des années 2000. En Bolivie, les surfaces cultivées ont doublé entre 2005 et 2012, atteignant environ 70 000 hectares pour 44 000 tonnes. Cet intérêt mondial pour le quinoa a conduit à une hausse des prix dans les pays andins. Le Pérou est le premier exportateur mondial devant la Bolivie et l’Équateur. Plus de la moitié de la production est exportée vers les États-Unis, un peu moins d’un tiers vers l’Union européenne et 6 % vers le Canada, ces trois régions représentant donc 94 % des exportations de quinoa bolivien.

Depuis 2009, la culture à grande échelle du quinoa a été introduite en France, de l’Anjou jusqu’au Poitou. Elle est passée de 100 à 200 hectares entre 2009 et 2010. Le prix de ce quinoa français demeure supérieur à celui importé d’Amérique du Sud mais le produit intéresse les consommateurs privilégiant l’agriculture de proximité. 250 tonnes/an sont produites en France (2014) alors que les français en consomment 3500 tonnes par année, c’est dire le succés!

La demande croissante du marché mondial pour le quinoa a engendré des modifications importantes de la part des agriculteurs boliviens en vue d’en intensifier la production. Le développement de la monoculture du quinoa se fait aux dépens d’activités comme l’élevage traditionnel du lama (son fumier servait à fertiliser le sol) ou la culture d’autres productions vivrières. Cela a des conséquences à la fois environnementales (appauvrissement du sol par la réduction des jachères) et sociales importantes. Si cette tendance freine, voire inverse partiellement l’exode rural, les revenus apportés entraînent néanmoins des tensions au sujet des terres.

Les diététiciens militent depuis longtemps pour augmenter la part des protéines végétales dans la ration en réhabilitant les céréales et les légumes secs (les protéines végétales devraient fournir 50% de l’apport protéique total). Le quinoa, par sa composition,  constitue une alternative intéressante aux autres céréales, notamment pour les végétariens.

Sources :

·         Maradini Filho AM et al. Critical Reviews in Food Science and Nutrition 2017; 57:1618-30

·         Nutri-doc lettre d’information du CERIN Le quinoa, “l’or jaune” des céréales N°127 Juin 2017

 

Composition moyenne du Quinoa (aliment cru)
Protéines 14,8 à 19 g
Lipides 2 à 9,5 g
Glucides 52 à 58,5 g
Magnésium 276 mg
Potassium 804 mg
Calcium 80 mg
Sodium 9,6 mg
Fer 8 mg
Fibres 6,7 g