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Régime sans gluten: en dehors de la maladie coeliaque, il n’est pas nécessaire!

L’intolérance au gluten (alias maladie coeliaque est une maladie auto-immune de l’intestin grêle provoquée par l’exposition alimentaire au gluten contenu dans différentes céréales, chez des personnes ayant une prédisposition génétique. Les symptômes, variables, comprennent souvent des diarrhées intermittentes ou chroniques et parfois des signes de malnutrition (fatigue, perte de poids) résultant d’une malabsorption intestinale. Une intolérance au gluten est retrouvée chez environ 5% des patients qui ont des troubles intestinaux bénins récurrents (colopathie fonctionnelle ou syndrome de l’intestin irritable. On a mis en évidence certaines affections associées à une intolérance au gluten: diabète insulino-dépendant (type 1), thyroïdites, dermatoses buleuses, déficit en IgA (immunoglobulines A)..

En cas de suspicion d’intolérance au gluten, la recherche d’anticorps IgA anti-transglutaminase dans le sang est utile. Cet examen a une sensibilité d’au moins 90% et l’absence d’IgA anti-transglutaminase permet d’écarter une intolérance au gluten avec un faible risque d’erreur, à condition de vérifier par le dosage des IgA totales que ce résultat n’est pas dû à un déficit global en IgA. La recherche d’anticorps spécifiques d’une intolérance au gluten n’est pas interprétable quand les patients suivent un régime sans gluten, qui rend les anticorps indétectables. Après un dosage d’anticorps spécifiques positif, une endoscopie digestive haute avec biopsie de la muqueuse de l’intestin grêle est l’examen de référence effectué par le gastro-entérologue pour confirmer l’intolérance au gluten.

En cas de troubles digestifs, ne pas confondre avec d’autres causes!

Quand une diarrhée persiste, d’autres affections qu’une intolérance au gluten sont à évoquer, notamment:

  • intolérance au lactose ou au fructose
  • insuffisance pancréatique
  • maladie de Crohn
  • rectocolite hémorragique
  • grêle radique (suite
  • colite microscopique
  • hyperthyroïdie

Effet de mode

Malgré la mode actuelle du gluten free, les régimes sans gluten chez les personnes sans maladie cœliaque ne doivent pas être encouragés. Exclure le gluten de son alimentation, pour cause de troubles intestinaux mais sans diagnostic formel de maladie cœliaque peut faire plus de mal que de bien, tranche cette nouvelle étude de grands instituts de recherche américains. Des données présentées dans le British Médical Journal qui contestent la tendance « branchée » mais non cliniquement motivée d’éviter tout gluten et l’associe même à un risque accru de maladies cardiaques.

Le gluten est une protéine trouvée dans les grains, tels que le blé, l’orge et le seigle qui déclenche l’inflammation et des troubles intestinaux chez les personnes atteintes de maladie cœliaque. Cependant, une tendance récente vante les avantages possibles pour la santé d’un régime sans gluten, y compris pour des personnes qui n’ont pas la maladie cœliaque. Ainsi, une analyse des données de la cohorte NHANES a montré que l’adhésion à un régime sans gluten chez des personnes exemptes de maladie cœliaque a été multipliée par 3 entre la période 2009-10 et la période 2013-14, atteignant une prévalence de 1,69%. Sur certains campus universitaires américains ou canadiens et dans beaucoup de grandes villes, il est tendance Cette étude montre que ces personnes qui souffrent de symptômes intestinaux mais qui ne répondent pas aux critères formels de la maladie peuvent avoir des problèmes cardiovasculaires, avec un régime sans gluten.

Les chercheurs de la Columbia University, du Massachusetts General Hospital, de la Harvard Medical School, du Brigham and Women’s Hospital et de la Harvard T. H. Chan School of Public Health ont suivi de 1986 à 2012, un grand nombre (110.017) de participants exempts de troubles cardiaques au début de l’étude, dont leur régime alimentaire et l’incidence d’événements cardiaques. Parce que le régime alimentaire peut être modifié en raison d’une maladie (diabète, cancer, événement cardiaque, ou intervention chirurgicale), les chercheurs ont pris en compte le régime alimentaire des participants avant le développement éventuel de telles conditions.

 

L’analyse constate qu’après prise en compte des autres facteurs de risque, la consommation de gluten n’est pas liée au risque de crise cardiaque. Cependant, des sous-analyses plus fines montrent que la réduction de la consommation de gluten des grains entiers (blé, orge et seigle) est bien associée à un risque accru de crise cardiaque par rapport à une consommation normale de ces nutriments. Précisément,

– l’apport journalier moyen de gluten au début de l’étude était de 7,5g chez les femmes et de 10g chez les hommes dans le groupe de consommation la plus élevée, vs 2,6g chez les femmes et 3,3g chez les hommes dans le groupe de consommation le plus faible.

– Les personnes ayant la consommation plus élevée de gluten ont tendance à boire moins d’alcool, à moins fumer, à consommer moins de graisses, moins de viande rouge non transformée et plus de grains entiers et de grains raffinés.

– Au cours des 26 années de l’étude, 6.529 participants (soit 5,9%) ont subi une crise cardiaque.

– Après prise en compte des facteurs de risque connus de maladie cardiaque, la différence entre les groupes n’apparait pas statistiquement significative. Mais lorsque les chercheurs examinent l’impact de la consommation de gluten dans les grains entiers, ils constatent que les personnes ayant la plus forte consommation de gluten ont un risque réduit de 15% de développer une crise cardiaque sur les 25 années de suivi.

Ainsi, l’étude confirme qu’un apport raisonnable de gluten, par l’intermédiaire de grains entiers et, en l’absence de maladie cœliaque, ont un risque réduit de maladie cardiaque. Ainsi, les régimes sans gluten chez les personnes sans maladie cœliaque ne doivent pas être trop encouragés.

Le régime sans gluten est devenu un véritable phénomène de mode. Certains l’ont adopté par confort, estimant se sentir ainsi en meilleure forme. D’autres, en revanche, y sont véritablement intolérants et souffrent de la maladie cœliaque qui attaque la paroi de l’intestin grêle. Son diagnostic est réputé difficile. Il passe par la recherche d’anticorps dans le sang et doit être confirmé par une biopsie du duodénum.

« Cette maladie auto-immune, qui se déclare à tout âge, n’est pas à prendre à la légère en raison de ses complications : anémie, déminéralisation, mais aussi risque plus élevé de lymphome de l’intestin », précise-t-on à l’Association française des intolérants au gluten.

Pour les personnes diagnostiquées intolérantes au gluten, le seul traitement possible est l’éviction stricte et définitive du gluten de l’alimentation. Or, le gluten se trouve naturellement dans les produits issus de céréales comme le pain, les pâtes, le grain de couscous… Il est également utilisé comme additif dans la préparation de nombreux aliments industriels. On le retrouve dans la sauce soja, certaines viandes hachées (non pur bœuf), les saucisses, des sauces, le bouillon cube, voire de la crème glacée, ce qui rend ce régime alimentaire extrêmement contraignant et difficile. C’est d’ailleurs pour cette raison que la plupart des patients atteints de maladie cœliaque se font généralement aider par des diététiciens.

Malgré l’aide de spécialistes, il n’est pas exclu que vous soyez accidentellement exposé au gluten. C’est en tout cas ce que révèle une récente étude américaine publiée dans l’American Journal of Clinical Nutrition. Des chercheurs ont analysé des échantillons de selles et d’urine de personnes souffrant de la maladie cœliaque et donc logiquement soumise à un régime strictement sans gluten. Malgré tout, ils ont constaté chez eux la présence de 150 à 400 milligrammes par jour de gluten, sans savoir précisément d’où il provenait.

Pâtes, pains, céréales : on trouve du gluten partout. Et même en faisant attention, des chercheurs ont découvert qu’il est possible d’en consommer de manière accidentelle. Dans tous les cas, l’équipe – dirigée par la société biopharmaceutique ImmunogenX – conclut que « de nombreuses personnes qui suivent un régime sans gluten en consomment régulièrement, suffisamment pour déclencher des symptômes et provoquer des dommages intestinaux ». Est-ce à dire que suivre un régime sans gluten ne sert finalement à rien ? Ou aurait un effet placebo pour certains ? Les scientifiques confirment que s’auto-prescrire un tel régime en l’absence de diagnostic d’intolérance est inutile et cher. Car les produits industriels sans gluten sont souvent plus onéreux. Sans compter qu’exclure le gluten de son propre chef, c’est risquer de passer à côté d’une véritable intolérance au gluten.

En cas de doute, il reste donc conseillé de consulter un médecin pour se faire dépister. Et si vous êtes réellement allergique, rien ne vaut l’accompagnement d’un spécialiste pour éviter tout risque.

 

 

Sources:

 

  • BMJ 2017;357:j1892  Mai 2017 “Long term gluten consumption in adults without celiac disease and risk of coronary heart disease: prospective cohort study”
  • www.santelog.com
  • Revue Prescrire n°440 Juin 2020 p.446 “intolérance au gluten