Vous connaissez le dicton « comme on fait son lit, on se couche », on pourrait rajouter « on dort comme l’on mange». Souvent les patients le signalent en consultation, depuis qu’ils ont démarré un changement d’alimentation, ils ont retrouvé une meilleure qualité de sommeil (et ne parlons pas de ceux qui sont traités pour apnées du sommeil et que la perte de poids améliore considérablement). Une grande étude américaine, menée par le Pr M. Grandner (Perelman School of Medicine – Université de Pennsylvanie) a présenté ses conclusions dans la revue « Appetite ». Ce travail montre tout l’impact de l’alimentation et de certains nutriments sur la quantité et la qualité du sommeil, et l’on sait que le sommeil est un déterminant essentiel de la santé et du bien-être !
Le Pr Grandner est un grand expert du sommeil. Il avait déjà démontré, en 2012, dans une grande étude menée sur plus de 150.000 personnes, publiée dans la revue « Sleep », que le sommeil s’améliore avec l’âge (et pas le contraire !).
Certains nutriments jouent un rôle fondamental dans le sommeil :
Avec l’augmentation mondiale de l’obésité et ses conséquences, les chercheurs spécialisés dans le sommeil sont de plus en plus nombreux à explorer les facteurs qui prédisposent à la prise de poids et à l’obésité. Cette étude montre pour la première fois que certains nutriments peuvent jouer un rôle fondamental dans le sommeil de courte et longue durée et que les personnes qui déclarent suivre un régime alimentaire varié ont un sommeil plus sain. De nombreuses études ont étudié le lien entre l’horloge biologique et le sommeil et l’obésité et les troubles métaboliques, montrant qu’une horloge décalée entraînait un risque accru d’obésité mais très peu d’études avaient exploré le lien entre sommeil et nutriments.
Cela nous ramène à l’importance de la diversité alimentaire : Les chercheurs de l’étude rappellent ainsi que ceux qui dorment entre 7 à 8 heures de sommeil chaque nuit sont plus susceptibles de connaître une meilleure santé globale et de bien-être. Les différences de régime alimentaire liées à un sommeil plus court ou de moindre qualité méritent d’être identifiées. L’équipe a analysé les données de l’Enquête nationale 2007-2008 et Nutrition Examination Survey (NHANES) représentatives de la population américaine. Les données sur le sommeil permettent de répartir les individus en groupes :
- Sommeil très court : moins de 5 h par nuit
- Nuit courte : 5 à 6 heures
- Nuit normale standard : 7 à 8heures
- Nuit longue : plus de 9 h de sommeil.
Les chercheurs ont étudié l’apport alimentaire d’une journée entière. Ils constatent que l’apport calorique total varie selon les groupes de sommeil, que ce sont les « petits dormeurs » qui consomment le plus de calories, suivis par les dormeurs « standard », suivis par les très petits dormeurs, suivis par les gros dormeurs. La variété alimentaire est la plus élevée chez les dormeurs normaux, et la plus faible chez les très petits dormeurs. Ces différences se retrouvent pour de nombreux types de nutriments, dont les protéines, les glucides, les vitamines et les minéraux.
L’analyse montre qu’un sommeil trop court est associé à une moindre consommation d’eau, d’aliments riches en lycopène (pigment présent dans la tomate par ex.), de vitamine C, de sélénium (qui se trouve dans les noix, la viande et les fruits de mer). Un sommeil long est associé à une moindre consommation de théobromine (chocolat et thé), d’acides gras saturés, d’oeufs, de viandes grasses et d’alcool. Les personnes qui dorment 7 à 8 heures chaque nuit ont des régimes alimentaires très différents, par rapport aux personnes qui dorment plus ou moins.
Un sommeil court et long est associé à une variété alimentaire plus faible. En modifiant son régime alimentaire, il y a de fortes chances de mieux dormir, préserver son capital santé et prévenir l’obésité, le diabète et les maladies cardiovasculaires. Avoir la forme et favoriser un sommeil sain et suffisant est un objectif qui fait rêver beaucoup de gens !
Pour maintenir un poids de forme : dormez !
Les Français ont tendance à surconsommer des somnifères et des antidépresseurs… L’analyse de leur sommeil faite par l’institut de sondages BVA, via le baromètre IFOP et l’INPES, montre que le sommeil de nos concitoyens n’est pas toujours suffisant ou de bonne qualité. Dormir peu affecte évidemment la performance intellectuelle et physique, et donc, la productivité. En médecine du travail, 20 à 40 % des salariés se plaignent du manque de sommeil. La réalité indique qu’un employé sur 5 manque de sommeil et 93 % des personnes interrogées reconnaissent être fatiguées au travail. L’INPES souligne que les jeunes adultes et les adolescents sont très touchés et accumuleraient chaque nuit une dette de sommeil.
Les dommages nutritionnels collatéraux sont le surpoids, le diabète, l’obésité, l’hypertension artérielle, les maladies cardio-vasculaires, le risque infectieux … En Europe, 25 à 35 % de la population est affectée par des troubles du sommeil, cela représente la bagatelle de 75 à 110 millions d’individus! Les campagnes de promotion de bonnes habitudes alimentaires devraient aussi parler du sommeil, comme elles parlent de bouger plus.
Pensez à bien dormir et n’oubliez pas: le sommeil est réparateur !
Sources:
- Décembre 2014 (sondage BVA pour Orange)
- http://www.ifop.com/media/poll/2899-1-study_file.pdf
- http://www.inpes.sante.fr/70000/dp/08/dp080310.pdf
- Nutrimarketing lettre consultation nutrition n°73 Sept. 2017
Jean-Paul BLANC
Diététicien – Nutritionniste
Neuilly Sur Seine