On pense à l’eau ferrugineuse du sketch de Bourvil. Beaucoup de femmes sont carencées en fer quand on fait des enquêtes alimentaires, surtout parmi les adeptes de la course à pied.
Le fer est vital pour notre organisme, il est présent dans le sang, c’est lui qui constitue le noyau central de la molécule d’hémoglobine, protéine essentielle des globules rouges. C’est l’hémoglobine qui véhicule l’oxygène de nos poumons à nos tissus, à nos muscles. Si nous en sommes privés, nous perdons toutes nos forces.
La carence en fer est un des troubles les plus répandus : elle concerne 10 à 20% de la population mondiale. Si elle touche surtout les pays pauvres où c’est la première cause d’anémie, nos pays « riches » ne sont pas exempts.
Ce phénomène pourrait sembler paradoxal étant donné l’opulence de notre alimentation.
En règle générale, les apports doivent compenser les pertes, c’est ce que l’on appelle la balance en fer. Quand la balance est négative, les réserves diminuent ; quand elles sont épuisées, on assiste à une altération de la synthèse de l’hémoglobine et à une diminution des enzymes riches en fer.
Le fer est indispensable à la vie bien qu’il soit présent dans l’organisme en quantité très faible : le corps d’un adulte renferme environ 4 g de fer soit 0,005 % de son poids en moyenne dont :
– 2 300 mg dans les globules rouges,
– 1 000 mg dans les réserves (moelle osseuse et foie),
– 500 mg dans les tissus.
Selon le sexe, les besoins seront différents.
L’originalité du fer, c’est qu’il fonctionne en circuit fermé. Le fer qui a pénétré dans l’organisme y reste. Au fur et à mesure que les globules rouges sont détruits, le fer qu’ils contiennent est en majeure partie récupéré. Il est stocké dans le foie, la rate et la moelle osseuse.
Les besoins
Les apports conseillés pour la population française sont les suivants :
Nourrissons (3 à 12 mois) | 6 à 10 mg/j |
Enfants (1 à 12 ans) | 7 à 10 |
Adolescents | 13 à 16 |
Hommes adultes | 9 |
Femmes en âge de procréer | 16 à 18 |
Femmes ménopausées | 9 |
Femmes enceintes | 25 à 35 |
Femmes allaitantes | 10 |
Source : ANC C.N.E.R.N.A. 2001 (Editions Tec & Doc)
Les pertes
Le fer est très peu éliminé par les urines, la sueur, la bile. Les seules déperditions physiologiques importantes interviennent en cas d’hémorragies accidentelles ou sont constituées chez la femme par les hémorragies menstruelles (1,6 à 2 mg/j au moment des règles).
Chez la femme enceinte, les pertes peuvent être supérieures à 3 mg/jour surtout au cours des derniers mois, car la future maman doit céder son fer au foetus et au placenta.
Lorsque la femme allaite, les besoins en fer augmentent énormément : le lait qu’elle donne à son bébé contient 0,04 à 0,05 mg de fer pour 100 ml, soit plus de deux fois la teneur du lait de vache. C’est une perte supplémentaire de 2,8 à 3,2 mg de fer par jour.
Même si la capacité d’absorption du fer au niveau intestinal augmente pendant la grossesse et l’allaitement, même si l’absence de règles représente une économie de fer, cela n’est pas suffisant pour compenser l’augmentation de besoins. Nous avons donc besoin de reconstituer nos réserves de fer.
Les apports
Ils dépendent de deux choses : de la teneur en fer des aliments, de la bio-disponibilité du fer.
Un aliment a beau être riche en fer, l’absorption intestinale du fer dépend des autres aliments consommés pendant le même repas. Parfois même le fer contenu dans l’aliment n’est pas assimilable…
– Fer héminique (que l’on trouve dans les produits animaux) : 20 à 25 % peuvent être absorbés au niveau intestinal.
– Fer non héminique (végétaux) :l’absorption est plus réduite : 5 % environ. La membrane cellulosique empêche le passage du fer.
–
Il existe des activateurs qui facilitent ce passage :
– l’acide ascorbique (vitamine C).
Un jus d’orange ou de citron peut multiplier par 3 ou 5 l’absorption du fer dans un repas.
– les tissus animaux :
Si on ajoute au repas des protéines animales (viandes ou poissons) le taux d’absorption est multiplié par 2 ou 3. Les produits d’origine animale, en dehors du fait que leur fer est très disponible, augmentent l’absorption du fer non héminique.
Il existe aussi des inhibiteurs importants :
– le thé :
C’est un des plus puissants qui ait été identifié. Il contient des tanins qui créent dans l’intestin des précipités de tanates de fer. Une tasse de thé prise pendant un repas peut faire chuter l’absorption de fer de 11 % à 2,5 % !
– le café :
Il a un effet inhibiteur aussi, mais moins puissant que le thé. Les polyphénols sont mis en cause. Dans les pays où le thé et le café sont servis avec le repas principal, il est probable que l’on améliorerait la disponibilité du fer en les consommant en dehors des repas principaux.
Parmi les autres substances ayant un effet inhibiteur, on peut citer l’ovalbumine du blanc d’oeuf qui aurait un effet dépresseur et aussi les protéines de soja. Le son et les fibres, en accélérant le transit, diminuent de fait l’absorption du fer, mais en moindre proportion.
Au total, on peut évaluer le coefficient d’absorption moyen du fer à 10 % environ (CNERNA). Les enquêtes montrent que les apports réels sont toujours inférieurs aux apports conseillés en France et la baisse de consommation des viandes n’améliore pas les choses.
Pour connaître les réserves en fer de l’organisme, on dose la férritine sérique avec du sang capillaire ; un dosage d’hémoglobine donnant un résultat inférieur à la normale (13-16 g) est le stade le plus important du manque de fer. L’anémie est responsable d’une pâleur, d’une fatigue, d’un essoufflement : devant toute fatigue inexpliquée, il faut rechercher chez le sportif et encore plus chez la femme sportive, une anémie par la numération des globules rouges et un épuisement des réserves en fer. L’abaissement de ces réserves est le tout premier signe d’une carence martiale. Une enquête sur des femmes travaillant en région parisienne et en âge de procréer, a montré que 22 % d’entre elles n’avaient pas de réserves en fer !
Une enquête menée dans six maternités de la région parisienne indique que quatre femmes sur cinq sont carencées dès le sixième mois de grossesse. De même, cette carence touche un enfant de dix mois sur deux, un enfant de deux ans sur trois, et un enfant de quatre ans sur cinq. On retrouve des chiffres équivalents dans d’autres pays industrialisés (Suède, U.S.A., Canada).
Pourquoi une telle carence ?
Parce qu’il existe une insuffisance des apports en général chez les femmes! Beaucoup sont des petites mangeuses (parfois par peur de grossir). La femme sportive doit être particulièrement vigilante. L’évolution des conditions de vie, fait qu’on assiste à une diminution des dépenses énergétiques d’où une diminution des apports énergétiques et une réduction des apports totaux en fer.
Il est difficile avec 2 000 Kcal. d’avoir un apport de 18 mg de fer par jour.
En ayant une activité physique plus intense, la ration alimentaire doit être augmentée et les apports en fer de ce fait, accrus. Actuellement, il est de plus en plus question d’enrichir l’alimentation en fer.
N.B. : L’anémie des coureurs à pied est connue. On l’attribue au choc plantaire répétitif, cause d’une petite hémolyse, réduisant le capital en hématies. Cependant, cette anémie serait attribuée aujourd’hui à une anomalie de la transferrine et ce problème n’est toujours pas élucidé.
Les aliments riches en fer
Les aliments riches en fer sont les viandes et en particulier certains abats, tels que le foie et les rognons, également les huîtres, les algues marines, les oeufs, ainsi que le cacao, les légumes secs, le soja, le cresson, et les fameux épinards dont la réputation est usurpée : leur teneur en fer est loin d’être exceptionnelle (s 4 mg/100 g), et de plus ce fer n’est pas assimilable car complexé par l’acide oxalique ! 1 % à peine de leur fer est absorbé alors que 20 % du fer du muscle de veau est lui assimilé par l’organisme.
Pour couvrir nos besoins en fer, la connaissance de la teneur en fer des aliments n’est pas suffisante. Il faut tenir compte, comme nous l’avons déjà vu, des différents taux d’absorption qui varient d’un aliment à l’autre, et ne pas oublier que le fer d’origine animale est mieux assimilé que le fer d’origine végétale.
Aliment |
Teneur en fer en mg/100g |
Boudin noir | 28 |
Viande de pigeon rôti | 20 |
Foie d’agneau | 14 |
Foie de volaille cuit | 10,4 |
Foie de génisse cuit | 7,7 |
Cœur de bœuf cuit | 7,3 |
Rognon de veau cuit | 5 |
Magret de canard | 4,8 |
Boeuf | 3,5 à 4,3 |
Pâté de foie de porc | 3,2 |
Agneau | 2 à 5 |
Cheval | 2 à 5 |
Canard rôti | 2,7 |
Confit de canard | 2,4 |
Andouillette poêlée | 2,3 |
En pratique
Il faut veiller à consommer du foie au moins une fois par semaine (pour ceux qui aiment cet aliment) En plus de sa richesse en fer, il est plein de vitamines. Consommer de la viande au moins 4 fois par semaine, ne pas bouder les oranges, les citrons et autres agrumes, sources de vitamine C, qui permet une meilleure absorption du fer. Éviter le thé et le café pendant les principaux repas.